Un jeune homme vivait en des temps reculés, avide de réalisation spirituelle. Le monde qui l’entourait ne lui convenait pas, il ne voyait partout qu’illusion, superficialité et désirs impurs.
Il entendit parler d’un grand maître zen, vivant dans un petit ermitage en haut d’une montagne surplombant la vallée. Il s’y rendit avec toute sa ferveur, aspirant à quitter le « bas-monde » pour s’immerger dans l’extase d’une retraite spirituelle aux côtés d’un maître réalisé.
Après plusieurs semaines de siège de l’ermitage, le maître zen l’accepta enfin. Pendant de longues années il lui dispensa son savoir et le jeune homme atteignit effectivement un haut degré de réalisation dans bien des domaines de la pratique.
Un jour le maître zen convoqua son disciple pour lui annoncer : « tu ne pourras rester à mes côtés qu’à une seule condition : que tu descendes dans la vallée pour remplir cette gourde et que tu me la ramènes !».
Le jeune homme était plein de confiance. Il se dit que cette mission serait aussi vite remplie que la gourde, et qu’il pourrait rapidement revenir aux côtés de son maître dans cet ermitage préservé.
Il descendit donc en trombe et remplit la gourde au premier puits qu’il croisa. Bien vite il retourna retrouver son maître. Quand celui-ci ouvrit la gourde, il la renversa : elle était vide !
Le jeune homme ne comprenait pas. Il aurait juré l’avoir rempli à ras bord. Il retourna dans la vallée, trouva un autre puits et remplit la gourde jusqu’à son bord. Effectivement il s’aperçut que sitôt remplie, la gourde se vidait, sans pourtant qu’il ne perçoive aucune fuite ! Il parcouru ainsi toutes les sources de la région, tentant de remplir la gourde qui se vidait sans cesse. Il fut d’abord abattu. Il savait que son maître refuserait de l’accueillir avec une gourde vide. Pendant encore 1 an il erra de source en puits, de fontaine en cascades … mais aucune eau ne semblait convenir.
Un jour, alors qu’il marchait dans le lit d’une rivière, il vit une femme lavant son linge en chantant doucement, des enfants jouant en riant autour d’elle. Devant cette scène, d’une telle simplicité et d’une telle beauté, il oublia sa quête et il se mit à pleurer.
A sa grande surprise les larmes qui tombaient dans la gourde semblaient vouloir y rester …
Il comprit alors que toutes ces années il avait cherché dans l’altitude de son ermitage une réalisation qu’il venait enfin de trouver dans cette banale scène du quotidien, au moment précis où il abandonnait sa quête acharnée.
En haut de la montagne, le maître zen souriait, son enseignement était enfin achevé.
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